La « citoyenneté mondiale » est une expression qui gagne progressivement du terrain et qui, sans s’imposer de manière évidente dans le discours politique, trouve de plus en plus sa place dans les argumentaires élaborés par certaines organisations ou personnalités militant dans divers domaines. À première vue, elle semble traduire une idée généreuse : reconnaître à tout individu la jouissance des libertés et droits fondamentaux, et ce, indépendamment de leur appartenance à un Etat-nation particulier. Le politologue aura naturellement tendance à interpréter une telle exigence comme le résultat d’une crise de légitimité du modèle d’Etat-nation et à considérer que sa diffusion est le signe d’un succès croissant de conceptions doctrinales essentiellement inspirées du cosmopolitisme1. Une analyse des occurrences de l’expression laisse pourtant entrevoir des usages bien plus diversifiés et équivoques que ceux que l’on peut retrouver dans les ouvrages théoriques de science ou de philosophie politique. L’objet de cette contribution est d’interroger ces différents usages et les logiques discursives qui les sous-tendent afin de mieux comprendre les finalités et le sens inscrits dans une telle expression. Elle a également pour objectif d’évaluer sa pertinence à travers des études de cas en relations internationales
2La méthode employée dans la première partie s’inspire d’une recherche récente menée dans le champ des études de sécurité. Dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, il est courant de se heurter à des termes ou expressions employés tant dans les médias que dans les discours politiques et les ouvrages scientifiques. Le plus souvent, ils se révèlent être polysémiques, chargés d’ambiguïtés, rétifs à toute définition et même utilisés à des fins différentes. Ainsi, des expressions en vogue comme « sécurité humaine », « action préemptive », « responsabilité de protéger », etc. sont déclinées différemment en fonction de l’identité du locuteur et du contexte dans lequel il s’exprime ; elles aboutissent à justifier des initiatives ou des conceptions de l’ordre mondial difficilement compatibles2. Une analyse des usages sociaux de ces expressions permet de se faire une idée relativement précise des significations quelles recèlent, du type d’acteurs qui les utilisent et à quelles fins, de leur caractère réellement « nouveau » ou non, et surtout des enjeux idéologiques qui sont attachés à leur usage3. Il s’agit, en bref, d’interroger le sens commun plutôt que les usages savants du terme, quand bien même il ne s’avère pas toujours évident, voire pertinent, de les distinguer4.
3La difficulté de ce genre de démarche est de constituer un corpus suffisamment représentatif de ces usages sociaux pour permettre une analyse inductive sérieuse. Le recours aux moteurs de recherche apparaît en pareilles circonstances comme une solution intéressante dans la mesure où elle permet d’avoir accès à des sources très diversifiées, du point de vue sociologique, géographique et thématique (organes de presse, communiqués officiels émanant de gouvernements ou d’organisations internationales, sites de présentation de partis politiques, ONG…). Bien entendu, cette démarche comporte des limites évidentes, et l’analyse qui en est le résultat doit tenir compte du fait que tout ne se retrouve pas sur la toile et qu’il est de surcroît matériellement impossible de lire toutes les occurrences. Il n’empêche que le test en lui-même permet de se faire une idée assez précise non pas, et il est important de le rappeler, des débats intellectuels sur la question de la citoyenneté mondiale5, mais plutôt des conditions dans lesquelles cette expression est employée aujourd’hui et ce quelle peut recouvrir.
4La première partie de cette étude porte donc moins sur la doctrine que sur l’idéologie ou, plus exactement, sur les usages vulgaires (dans un sens non péjoratif) de l’expression. Elle vise essentiellement à cerner les significations de la citoyenneté mondiale afin d’en présenter les traits fondamentaux. Dans un deuxième temps, nous reviendrons précisément sur ces éléments discursifs afin de les confronter aux données plus factuelles tirées de recherches récentes en relations internationales. Ce sont les résultats engrangés par cette analyse qui ont déterminé le choix du titre qui exprime un certain scepticisme, essentiellement nourri par le manque de traduction effective de cette « idée » sous ses différentes acceptions. Néanmoins et eu égard aux limites inhérentes à la méthodologie employée, les conclusions ne pourront bien entendu être considérées comme définitives.
Les usages multiples de la « citoyenneté mondiale »
5Un premier aperçu des occurrences sur la toile de l’expression en langue française permet de prendre la mesure du caractère très contrasté de ses usages6. On constate à première vue quelle semble particulièrement prisée par les associations ou groupements actifs dans le domaine de l’éducation et de la culture. Mais elle n’est pas pour autant l’apanage de la « société civile », les représentants politiques et les sites officiels d’institutions gouvernementales y recourent également, quoique de manière bien plus limitée.
6En Belgique d’abord, le moteur de recherche nous a ainsi conduite sur le site des guides catholiques de Belgique7, un site pro-life « pour une civilisation digne de ce nom8 » et le site du Rotary Club. Il nous a également donné accès au discours prononcé par le premier ministre Guy Verhofstadt à l’occasion de la Conférence internationale sur le financement du développement qui s’est tenue à Monterrey en mars 20029. En France, un lien a, sans surprise, été établi avec un site français « altermondialiste » reprenant un article de Laurent Nihoul : « vers une organisation mondiale de la citoyenneté », qui suggère de repenser l’organisation de la cité pour la faire correspondre à l’organisation des échanges sur le plan économique10, une contribution que l’on retrouve également sur le site belge « les territoires de la mémoire », une association qui a pour objectif de sensibiliser les populations à la lutte contre le racisme et la xénophobie et toutes les formes d’exclusion11. Le moteur de recherche nous a également conduite sur le site des Baha’is de France12. Sur le site officiel de la République française figure un texte intitulé « D’une citoyenneté nationale à une citoyenneté mondiale ? » ; l’émergence d’une société civile mondiale et d’une opinion publique mondialisée est mise en évidence, mais pour autant, son auteur relève l’absence sur le plan mondial d’institutions permettant de créer une véritable citoyenneté (droit de vote, enceinte parlementaire, institutions judiciaires…)13. Au Canada, l’expression apparaît notamment sur le site de l’Union des forces progressistes au sujet de l’organisation de « Journées alternatives : de l’action locale à la citoyenneté mondiale »14. Elle est aussi reprise à l’agenda des activités organisées sous l’égide de la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa et de l’Agence canadienne de développement international15 ; elle figure en bonne place dans un mémoire du Conseil canadien pour la coopération internationale dont l’enjeu est de « promouvoir la citoyenneté mondiale au sein de la population canadienne16 ». Enfin, la recherche des occurrences en langue anglaise (World Citizenship) donne aussi l’impression qu’il existe un florilège similaire d’usages de l’expression. À y regarder de plus près, on constate que ceux-ci peuvent néanmoins faire l’objet d’une catégorisation qui permet de mettre en évidence certains traits les distinguant les uns des autres, voire de les opposer, alors même que l’expression repose a priori sur une vision irénique et harmoniste de la communauté des êtres humains. Trois catégories d’usages du terme « citoyenneté mondiale » ressortent en effet de cette recherche sur la toile.
La citoyenneté mondiale comme vecteur d’une conception religieuse, organiciste et antipolitique de l’humanité
7Une des définitions de la citoyenneté mondiale considère que le citoyen « standard» national est celui qui prendra les armes contre un autre si le gouvernement duquel il dépend le lui demande17, tandis que le citoyen mondial reconnaît que le monde est un tout auquel il appartient. Le Ierjanvier 2005, le pape Jean-Paul II affirmait de même
L’appartenance à la famille humaine confère à toute personne une sorte de citoyenneté mondiale, lui donnant des droits et des devoirs, les hommes étant unis par une communauté d’origine et de destinée suprême. Il suffit qu’un enfant soit conçu pour qu’il soit titulaire de droits, qu’il mérite attention et soins, et que chacun ait le devoir d’y veiller. La condamnation du racisme, la protection des minorités, l’assistance aux réfugiés, la mobilisation de la solidarité internationale envers les plus nécessiteux, ne sont que des applications cohérentes du principe de la citoyenneté mondiale18.
8Très souvent, il est considéré que, par-delà l’État, c’est à la terre, « mère nourricière », que le citoyen du monde devrait faire allégeance et aux lois de la nature qui sont l’équivalent de la figure du « père protecteur ». Ce type d’allégeance est le fondement de la vérité, de l’universalité de la connaissance et de toutes les valeurs. Dès lors, on ne peut concevoir de démocratie et de citoyenneté dans un cadre national, car une telle conception aboutit à faire des distinctions (citoyen-étranger) qui contredisent les lois de la nature et le caractère unitaire du genre humain19. La citoyenneté mondiale et la démocratie directe (à travers la création d’institutions de gouvernement mondial) constituent les moyens les plus évidents de réconcilier la globalisation économique et sociale, le monde tel qu’il fonctionne aujourd’hui et les droits inaliénables des individus. Dans un tel schéma, la citoyenneté mondiale ne peut se concevoir comme une stratégie politique puisqu’elle est appelée à transcender les divisions partisanes (entre droite et gauche) et nationales, ce à quoi s’emploient les dignitaires religieux afin que les individus soient en parfaite harmonie avec le monde qui les a fait naître. Les Baha’is de France considèrent que l’humanité constitue une seule et même race et que le jour est maintenant venu de son unification en une société globale20.
9Il s’agit là d’un processus irrésistible, car issu d’une volonté divine. Cette nouvelle citoyenneté englobe les principes de justice sociale et économique ; elle se base sur la reconnaissance de l’égalité des sexes et le rejet de toutes les discriminations (ethnique, religieuse, nationale…). C’est une stratégie qui est censée contribuer au développement durable et qui se base sur le sens du sacrifice pour le « bien commun21 ».
La citoyenneté mondiale comme politique éducative
10Les usages les plus communs de la « citoyenneté mondiale » semblent être surtout conçus dans une optique d’éducation de la population22. Ainsi, leCouncil for Education in World Citizenship (fondé en 1939) poursuit l’objectif de former toutes les générations à prendre leurs responsabilités pour le futur23. Le Conseil de l’Europe organise depuis 1999 une « semaine de l’éducation à la citoyenneté mondiale » qui porte le plus souvent sur les thèmes de la pauvreté et de l’exclusion sociale en insistant tout particulièrement sur l’importance de développer « la conscience de notre rôle de citoyens du monde, notre aptitude à la communication interculturelle, notre capacité d’agir pour rendre le monde plus équitable et plus écologiquement durable ». À l’instar du Congrès paneuropéen qui s’est tenu à Maastricht en novembre 2002, ses concepteurs estiment que le monde a besoin de citoyens éclairés pour plus de justice et d’équité, et surtout pour relever les défis de la mondialisation24.
11Enfin, il faut encore évoquer dans cette perspective l’initiative lancée par Benjamin Barber et Sandra Myers de l’Université du Maryland, « les journées de l’interdépendance », qui sont célébrées le 12 septembre – date choisie par référence au symbole négatif du II septembre — et qui sont destinées à créer, ou à entretenir, le sentiment d’être un citoyen du monde en veillant en particulier à favoriser une éducation basée sur une plus grande tolérance et permettant une réelle ouverture sur le monde25.
12Dans ce cadre, les initiatives viennent de la société civile, mais elles trouvent facilement des relais dans les institutions étatiques ou les organisations intergouvemementales qui peuvent, sans remettre en cause le mode de fonctionnement de l’Etat, faire écho à ces préoccupations. Ce qui est assurément moins le cas du troisième type de discours sur la citoyenneté mondiale.
La citoyenneté mondiale comme protection juridique universelle
13Au sein de l’« Ambassade universelle de Bruxelles », les militants ont pour principal objectif de résoudre les problèmes des sans-papiers. Ils n’ont de cesse de dénoncer les politiques restrictives des gouvernements européens en mettant en évidence le hiatus existant entre le mouvement de mondialisation et les conceptions de plus en plus restrictives du droit d’asile, conceptions qui entraînent un déni des droits fondamentaux au détriment des plus déshérités26. Cette volonté d’élargir la protection des droits fondamentaux aux personnes ne bénéficiant pas de la citoyenneté de l’Etat sur le territoire duquel elles se trouvent est assurément un point commun de toutes les initiatives que nous avons pu répertorier et qui, tout en partageant certains points communs avec les deux autres catégories (un certain cosmopolitisme doublé d’une volonté militante de changer les esprits pour changer le monde), ont élaboré des revendications politiques spécifiques qui trouvent difficilement un relais dans le monde politique. La lecture des propositions de Yann Moulier Boutang permet de prendre la mesure des différences de culture politique existant entre les militants de la citoyenneté mondiale et la majorité des responsables politiques de la plupart des États-nations. Dans la perspective d’un approfondissement de la démocratie, il suggère en effet d’ajouter deux critères permettant de redéfinir la citoyenneté. Selon lui, il convient, en premier lieu, de considérer que le premier droit d’un individu est de définir lui-même ses appartenances : ce n’est pas à la puissance publique de les lui imposer. Il faut, en second lieu, s’assurer que les droits du citoyen ne sont pas conditionnés par son travail salarié alors même le salariat devient intermittent. Dès lors, il est nécessaire de garantir un revenu minimum face à la précarité croissante… « Voilà pourquoi la gauche globale a tout à gagner à être européenne : citoyenne du monde dans le choix et citoyenne d’une Europe fédérale lorsqu’il s’agit de construire des institutions internationales et de forger une alliance stratégique avec le Sud27…
14Dans un sens, la conception « mondialiste » de la citoyenneté découlerait du fait que : « Il existerait désormais un espace particulier d’intervention à privilégier, le mondial, des institutions spécifiques sur lesquelles agir et une citoyenneté de même niveau, dès lors que la scène mondiale serait devenue accessible aux individus28. »
15En conclusion, les usages les plus courants de l’expression citoyenneté mondiale permettent de mettre en évidence plusieurs acceptions :
- La première est très substantielle : la citoyenneté mondiale est avant tout l’expression du genre humain. Dans la plupart des cas, elle est le produit d’une vision très organiciste des rapports entre les êtres humains et leur environnement naturel. Sa mise en oeuvre s’inscrit dans une dynamique apolitique de réconciliation autour de valeurs essentialistes d’inspiration religieuse.
- La deuxième relève plutôt de l’initiation : la citoyenneté mondiale est un label qui est utilisé dans le cadre de programmes éducatifs prônant essentiellement l’ouverture sur le monde et le dialogue interculturel ; elle exprime aussi, dans une certaine mesure, une forme de compassion pour les déshérités et les exclus.
- La troisième est plus juridico-politique et vise essentiellement à assurer les bénéfices de la citoyenneté nationale à des catégories plus importantes que celles concernées jusqu’ici, tout en cherchant à élargir le champ des droits et libertés qui sont attachés à la notion de citoyenneté.
16Cependant, cet aperçu très général des usages de la citoyenneté mondiale serait incomplet si l’on ne faisait mention de ses usages péjoratifs. L’extrait suivant d’une émission radio est à cet égard assez symptomatique de la défiance que peut susciter l’idée même de citoyenneté mondiale :
Bon la mondialisation… Alors là, on est, comment dire, on est sur un gros morceau. C’est-à-dire que, moi je pense en fait – je vais peut-être prendre les auditeurs à rebrousse-poil, bon, mais ça va les réveiller… mais je fais partie de ceux qui considèrent que la mondialisation, c’est d’abord, à nouveau, quelque chose qui joue sur le registre des représentations. C’est-à-dire que, ce qui est en jeu à travers la mondialisation c’est une certaine représentation qu’on cherche à instiller dans le corps social, dans la tête de chacun. Et c’est pour ça, je vais à la conclusion avant de développer, que moi je suis contre la mondialisation. Alors quel est l’enjeu ? Eh bien ce qu’on cherche à instiller dans la tête de chacun, à travers la mondialisation, c’est l’idée que les principales décisions, en matière économique et sociale sont prises dorénavant, sont prises d’emblée à l’échelle du monde. C’est-à-dire qu’on laisse entendre maintenant que le sort de chacun, le sort immédiat de chacun, se joue quotidiennement, d’abord et avant tout, à l’échelle du monde. Et si on y réfléchit bien, en fait, cette trame-là, ça aboutit à quoi ? Eh bien, ça aboutit, bien entendu, à dessaisir le peuple. Parce que le peuple, à cette échelle-là, à l’échelle du monde, il n’a aucune prise ! Par définition ! Il y a que de joyeux zozos, doux rêveurs, là pour le coup, qui parlent de « citoyenneté mondiale »… On pourra y revenir m’enfin… Ce sont des thèses qui ne tiennent pas compte du fait que, pour que le pouvoir du peuple puisse s’exercer, il faut qu’il existe un cadre institutionnel dans lequel il puisse s’exercer. Il n’y a pas de citoyenneté mondiale tout simplement parce que pour être citoyen, il faut vivre en république. La citoyenneté, ce n’est pas un sentiment. J’ai des amis qui se disent citoyens du monde… Mais je leur dis toujours : « Mais la citoyenneté, si on la prend au sens fort, si l’on prend la citoyenneté au sérieux, la citoyenneté ce n’est pas un sentiment ! ! ! » C’est la république qui institue les citoyens. Si on ne vit pas en république, on n’est pas citoyen, et comme il n’y a pas de république mondiale, il n’y a pas de citoyenneté mondiale. Il peut y avoir des contre-pouvoirs, le travail des ONG, des associations, qui sont tout à fait utiles, il ne s’agit pas du tout de nier ça, et je ne nie pas qu’il y ait une nécessité de politiques internationales, mais ce qui est en jeu à travers la mondialisation, c’est autre chose29.
L’action internationale « en faveur de la citoyenneté »
17Dans le domaine des relations internationales, la citoyenneté apparaît rarement comme une problématique digne d’intérêt. Une telle situation n’est pas étonnante tant la distinction entre sphères interne et internationale est encore prégnante. Ceci a pour conséquence de confiner les questionnements sur ce thème dans un champ disciplinaire centré sur l’étude des institutions de l’État et de l’exercice du pouvoir politique. Elle semble ainsi négligée par la plupart des spécialistes de cette sous-discipline de la science politique. Certes, des auteurs, de plus en plus nombreux, ont critiqué cette séparation au nom même de l’idée démocratique (sur un plan normatif) ou par référence à des considérations relevant essentiellement de la méthodologie ou de l’épistémologie30. Dans la plupart des cas, ces réflexions portent sur l’établissement d’un ordre cosmopolitique par définition plus juste et plus équitable qui pourrait se construire à la faveur d’une réforme en profondeur des institutions internationales et de l’organisation de la participation de la société civile aux processus décisionnels31. Sans entrer dans les considérations d’ordre normatif – déclinées le plus souvent sous une forme normative – qu’implique cette approche, nous n’évoquerons ici que les éléments empiriques susceptibles de confirmer ou d’infirmer l’émergence d’une forme de citoyenneté qui ne serait plus exclusivement rattachée à un État particulier. En d’autres termes, on se demandera si des manifestations des diverses acceptions de la citoyenneté mondiale peuvent être repérées sur la scène internationale.
18À vrai dire, il n’est possible que de livrer des impressions très générales tant le champ de recherche est vaste. L’une d’elles s’est rapidement imposée ; elle repose sur un constat et un paradoxe : on n’a jamais autant évoqué les droits de citoyens dans les organisations internationales, en particulier à l’ONU, jamais dépensé autant d’argent et d’énergie pour la surveillance des processus électoraux, consacré autant de moyens au rétablissement de l’État de droit dans les pays en proie à de graves conflits internes32… Sans compter les innovations juridictionnelles que représentent les tribunaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie, le Rwanda, la Sierra Leone. Pour autant, il n’est pas évident que ces initiatives puissent contribuer à donner de la substance à l’idée de citoyenneté mondiale. D’une part, la citoyenneté est souvent entendue dans son sens le plus formel et le plus étroit et, d’autre part, les Etats libéraux qui se donnent pour des modèles participent à la diffusion de cette conception assez restrictive. Qui plus est, ils développent des pratiques qui semblent parfois contribuer à en saper les fondements.
La promotion internationale du citoyen ; une conception formelle avant tout
19Dans la plupart des initiatives prises par l’ONU ou d’autres acteurs internationaux, on ne pourra manquer de relever que c’est bien une conception nationale de la citoyenneté que l’on promeut, une conception essentiellement centrée sur les droits de la première génération (l’exercice des droits civils et politiques) dans un cadre territorial défini par les frontières de l’État33. La citoyenneté se conçoit avant tout comme le droit de prendre part à des processus électoraux présentant certaines garanties et qui puissent être sanctionnés par des observateurs internationaux34. Dans le cadre des processus de « transition politique », la démocratisation repose le plus souvent sur des méthodes de transformation des structures de pouvoir « par le haut » visant à reproduire une forme étatique de libéralisme en évacuant « la question du sujet politiquement constituant35 ». Si Kofi Annan ne manque jamais de rappeler l’importance de la lutte contre la pauvreté dans le contexte de la promotion des droits de citoyenneté36, il est surtout question d’organiser au mieux un transfert de fonds du Nord vers le Sud et non de soutenir les luttes sociales dans le Sud, une zone dont les problèmes découleraient essentiellement des pratiques de corruption et de mauvaise gouvernance imputables aux élites locales37.
20Si l’on évoque le cas de la protection juridique offerte par certaines juridictions pénales internationales mises sur pied avec le soutien de l’ONU, on remarquera que c’est surtout à la victime que l’on s’adresse et moins au citoyen. De manière générale, cette protection juridique concerne la jouissance de certains droits fondamentaux et la sanction des contrevenants, mais pas une participation à l’élaboration de la norme juridique à proprement parler ; ou encore à son interprétation ou à sa mise en oeuvre qui restent largement aux mains d’une élite composée de juristes occidentaux ou de juristes locaux formés par ceux-ci38.
Une citoyenneté sous surveillance et conditionnée : le cas des territoires sous administration internationale
21Depuis quelques années, nous assistons à la multiplication de discours favorables à la mise sous tutelle de certains « États faillis » ou « injustes ». Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et, plus généralement, dans la perspective d’une lutte contre les désordres mondiaux, il est de plus en plus fréquent d’entendre des appels en faveur, non pas d’une nouvelle forme de colonisation, mais de ce que pourrait qualifier de « gestion temporaire pour compte d’autrui39 ». À titre d’exemple, on évoque souvent le cas de l’administration par l’ONU du Timor oriental et du Kosovo, ainsi que celui de l’Irak entre la chute du régime de Saddam Hussein et le transfert de souveraineté intervenu en juin 200440. C’est un phénomène qui a été particulièrement bien étudié par William Bain41. En comparant ces nouvelles formes de « protectorat » avec l’institution du trust en droit anglo-saxon, il parvient à la conclusion qu’il est pour le moins malaisé de concilier le principe de l’indépendance politique qui conditionne la jouissance des droits de citoyenneté et l’administration internationale d’un territoire quand bien même celle-ci se justifierait par le souci de permettre l’autodétermination effective du peuple dont elle a la charge.
22Dans les territoires sous administration internationale ou dont la souveraineté est suspendue (Timor oriental, Kosovo), ou en partie exercée par des organes politiques externes (Bosnie-Herzégovine), c’est donc encore une conception très formelle de la citoyenneté qui s’impose. L’examen des pouvoirs extraordinaires dont jouissent les « hauts représentants de la communauté internationale » permet de prendre la mesure du caractère très embryonnaire des droits du citoyen42. En Bosnie-Herzégovine, le haut représentant a été investi par les États membres du Groupe de contact43 du pouvoir de démettre des élus, de mettre un terme à des émissions jugées contraires à l’esprit des accords de Dayton ou de toute autre initiative pouvant nuire à la mise en oeuvre de ceux-ci. Il est certes possible de trouver ces décisions légitimes dans le contexte bosniaque, mais il n’en reste pas moins que, dans ce type de situation, la limitation de la souveraineté imposée de l’extérieur a un impact évident sur l’étendue des droits effectifs du citoyen à prendre part aux décisions qui ont un impact évident sur sa vie quotidienne44. Cette situation est justifiée par le caractère transitoire de l’administration internationale du territoire dont l’objectif affiché est de contribuer in fine à l’établissement d’un Etat dans lequel le droit à l’autodétermination serait effectif alors même que les régimes précédents auraient privé leurs citoyens de l’exercice des droits les plus fondamentaux. Néanmoins et dans le contexte actuel, la prolifération des formes d’administration internationale de territoires, doublée des discours de légitimation d’une nouvelle forme d’impérialisme libéral45, permet de douter des progrès et de l’effectivité de l’idée de citoyenneté, même dans son acception la plus étroite.
Le développement d’espaces anomiques : conséquences non intentionnelles de la mondialisation ou stratégie d’évitement ?
23Les attaques terroristes du n septembre 2001 ont vu la multiplication d’activités extraterritoriales des États (c’est-à-dire d’activités qui reposent sur l’exercice de la puissance publique et de l’autorité d’un État hors de sa juridiction) qui posent un problème au regard du respect des droits civils et politiques et des libertés fondamentales46. Ainsi, la détention de personnes suspectées de terrorisme dans les bases militaires de Guantanamo, l’interrogatoire des prisonniers d’Abu Ghraib, la détention de djihadistes sur la base de Bagram en Afghanistan, mais aussi les tentatives de certains gouvernements européens de créer des centres de détention pour demandeurs d’asile hors du territoire de l’Union relèvent précisément de cette catégorie d’activités47. Pour les caractériser, on parle souvent de « trou noir juridique » ou de « zone sans droit » pour souligner précisément l’inapplicabilité des instruments juridiques traditionnels de protection des droits de la personne. Comme Ralph Wilde l’a bien démontré48, le problème n’est pas tant juridique que politique : c’est précisément pour contourner les règles juridiques que certaines activités de la puissance publique sont « délocalisées » ou « privatisées » (comme dans le cas de figure des interrogatoires menés par des agences de sécurité privées)49. En ce sens, on devrait dès lors considérer que les espaces anomiques résultent avant tout de décisions politiques volontaires et moins d’une inadéquation plus imaginaire que réelle entre les normes juridiques et les réalités sociales et politiques quelles ont vocation à régir. Cette stratégie semble contrecarrer les effets attendus de la reconnaissance de l’idée de citoyenneté dans la mesure où elle correspond à une extension du pouvoir politique et de l’exercice de la coercition sur des territoires ou des personnes sans reconnaissance des garanties normales de protection offerte en principe par la citoyenneté classique50.
24En conclusion, il apparaît que l’action internationale en faveur de la citoyenneté se concentre sur la promotion de la citoyenneté dans un cadre strictement national et sous une acception très formelle et limitée. La réactivation des institutions de tutelle ou les nouvelles formes de protectorat peuvent, dans une certaine mesure, être reliées à l’aspect essentiellement « éducatif » de l’idée de citoyenneté mondiale, mais, dans les faits, elle consacre bel et bien une conception très restrictive de la citoyenneté51. Quant aux activités extraterritoriales des Etats et aux discours de légitimation qui les accompagnent dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, ils ont pour conséquence soit d’imposer une citoyenneté conditionnée par les exigences de sécurité des États intervenants ou de leurs propres conceptions politiques (Irak), soit de restreindre en fait et en droit le champ d’application des droits fondamentaux du citoyen. La mondialisation en cours n’entraîne donc pas automatiquement une extension effective des droits liés à la citoyenneté, et encore moins une conception plus « mondialiste » de celle-ci. Ce phénomène s’avère d’autant plus inquiétant, selon certains observateurs52, que l’humanisme et l’universalisme qui en sont les fondements sont actuellement détournés au profit d’un « nouvel impérialisme libéral », un autre mirage postmoderne53 laissant lui aussi entendre qu’il est possible de concilier des choses apparemment contradictoires ou difficilement conciliables.
25Tant la polysémie conceptuelle qui ressort de notre typologie des usages discursifs de l’expression « citoyenneté mondiale » que les limites et ambivalences des actions internationales témoignent bien que les discours et les pratiques autour de la « citoyenneté mondiale » relèvent eux aussi davantage du mirage que de l’émergence d’un régime transnational ou supranational de citoyenneté.
NOTES
1 Voir la contribution de Paul Magnette dans cet ouvrage
2 Barbara Delcourt, « The Doctrine of Responsibility to Protect and the EU Stance: A Critical Appraisal », dans Giovanna Bono (dir.), European Foreign and Security Policy after September 2001 and the « New Waron Terror », à paraître ; Barbara Delcourt, « Pre-emptive Action in Iraq: Muddling Sovereignty and Intervention? », Global Society, p. 20, n° I, janvier 2006, p. 47-67.
3 Voir notre étude, « Les dommages collatéraux de la nouvelle stratégie états-unienne : de la sécurité collective à la sécurité sélective », dans Barbara Delcourt,Denis Duez et Éric Remacle (dir.), La guerre d’Irak, prélude d’un nouvel ordre international ?, Bruxelles, P.I.E./Peter Lang, 2004, p. 21-39.
4 Voir les réflexions de Bernard Lacroix concernant l’inclination à l’objectivisme du politiste, « Ordre politique et ordre social. Objectivisme, objectivation et analyse politique », dans Madeleine Grawitz et Jean Leca (dir.), Traité de science politique, p. I, Paris, PUF, 1985, p. 483 et suivantes.
5 Voir la contribution de Paul Magnette dans cet ouvrage.
6 Tous les sites mentionnés ci-après ont été consultés durant le mois de mars 2005
7 Organisation catholique de jeunesse équivalente aux scouts et destinée aux jeunes filles. En ligne : <www.guides.be/fr/secteurs/international/internat.html>.
8 8 <www.amdg.easynet.be/amdgsvie.html>.
9 <www.diplomatie.be/newyorkun/default.asp?id=52&mnu=52>.
10 Voir également le document « Pourquoi citoyens du monde ? », en ligne : <www.recim.org/cdm/kial-fr.htm>.
11 <www.territoires-memoire.be/asso/index.php>.
12 Voir les références reprises ci-dessous (notes 20 et 21).
13 <www.vie-publique.fr/decouverte_instit/citoyen/citoyen_3_4_0q6.htm>.
14 <www.ufp.qc.ca/imprimer_breve.php3?id_breve=760>.
15 Conférence : l’enseignement de la paix, de la citoyenneté mondiale et de la septembre 2005.
16 <www.ccic.ca/f/docs/002_ipr_engaging_paper_2004-06-pdf>.
17 « World Citizenship Defined », en ligne : <www.worldservice.org/wcd.html>.
18 <http://christicity.com/article.php3?id_article=1518>.
19 « World Citizenship Defined », en ligne : <www.worldservice.org/wcd.html>.
20 <www.bahai.fr/article.php3?id_article=71>.
21 Déclaration de la communauté internationale Baha’ie, « Citoyenneté mondiale : une éthique universelle pour le développement durable », en ligne : <www.bcca.org/ief/bicwdcfr.htm>.
22 Voir le site du Congrès paneuropéen qui s’est tenu à Maastricht en novembre 2002, <www.globaleducationeurope.net>.
23 MNN TRUST (en partenariat avec l’UNESCO) ; il vise essentiellement à identifier les traits communs des religions et des idéologies pour en faire un corpus de principes universels destinés à être diffusés dans les universités, écoles, collèges du monde entier. Cette organisation caritative entend participer à une meilleure compréhension des religions et contribuer à l’amélioration des relations interculturelles. Très concrètement, elle propose de créer un passeport universel qui pourrait s’avérer utile dans les situations de crise humanitaires provoquant des déplacements de populations, <homepages.ihug.co.nz/-nabi/>.
24 <http://www.coe.int/t/f/centre_nord-sud/programmes/3_Education_%Eo_la_citoyennet%E9_mondiale/> ; les sites canadiens précités contiennent des conceptions très similaires de la citoyenneté mondiale.
25 Chronique de l’ONU, « Point de vue : un appel à l’action : la campagne CivWorld par Sondra Myers et Benjamin Barber », en ligne : <www.un.org/french/pubs/chronique/2004/numéro1/01104p76.asp>.
26 Carnet de bord – Universal Embassy, Bruxelles, Papier, décembre 2001, n° 1. Voir le très beau texte d’Étienne Balibar pour qui la citoyenneté n’est pas qu’une institution ou un statut, c’est aussi et surtout une pratique collective ; il se réjouit du fait que les sans-papiers ont cessé de figurer comme des victimes pour devenir des acteurs de la politique démocratique. Il faut toutefois relever le fait que lui-même ne fait aucun usage de la notion de citoyenneté mondiale.
27 Yann Moulier Boutang, « Citoyens à l’ère globale », tribune parue dans la rubrique carte blanche de l’Humanité, 20 janvier 2004. Disponible en ligne sur le site web de la revue Multitudes : <multitudes.samizdat.net/article.php3?id_article=1291>.
28 Michel Rogalski, « Nouveau mondialisme et internationalisme après Seattle »,Le débat stratégiques, n° 50, mai 2000 ; voir aussi en ce sens l’appel du 3 mars 1966 de 13 Citoyens du Monde de réputation mondiale en faveur de la citoyenneté mondiale, en ligne : <http://citmonde.free.fr/Appel.htm> (page consultée le 3 octobre 2006).
29 Christophe Ramaux, sur radio ALIGRE T-M 93.1, retranscription disponible sur : <dsedh.free.fr/transcription/ramaux56.htm> ; voir aussi André Bellon,Pourquoi je ne suis pas un altermondialiste. Eloge de l’antimondialisation, Paris, Mille et une nuits, 2004.
30 Stefano Guzzini, « Maintenir les dilemmes de la modernité en suspens. Analyse éthique post-structuraliste en relations internationales », dans Klaus-Gerd Giesen (dir.), L’éthique de l’espace politique mondial. Métissages disciplinaires, Bruxelles, Bruylant, 1997, p. 273-281.
31 Voir les débats autour du rapport Cardoso, en ligne : <www.un-ngls.org/UNreform-FRA.htm>.
32 Toutefois, et selon Barbara Ann J. Rieffer et Kristan Mercer, dans « US Democracy Promotion: The Clinton and Bush Administrations », Global Society,p. 19, n° 4, octobre 2005, p. 390 et suivantes, les budgets consacrés à la promotion de la démocratie par les administrations Bush et Clinton restent encore très modestes.
33 C est aussi le cas pour les promoteurs de la démocratie au sein de l’ONU qui font partie du caucus des Etats démocratiques, sauf peut être pour l’un des promoteurs les plus actifs : le parti radical transnational. C’est en partie me semble-t-il parce que le principal acteur à l’origine du processus, les États-Unis, n’est pas partie au Pacte de 1966 sur les droits sociaux, culturels et économiques. Voir le site <www.democracycaucus.net/html/home.html> (page consultée le 3 octobre 2006). Pour une vision critique des politiques de démocratisation, voir Nicolas Guilhot, The Democracy Makers: Human Rights and International Order, New York, Columbia University Press, 2005 et William I.Robinson, Promoting Polyarchy. US Intervention, Globalization and Hegemony,New York, Cambridge University Press, 1996.
34 Pour une critique de la conception de la démocratie telle quelle est conçue par les États européens à l’occasion de leur gestion de la dissolution de la fédération yougoslave, voir notre ouvrage Droit et souverainetés. Analyse critique du discours européen sur la Yougoslavie, Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang, 2003.
35 Nicolas Guilhot, « La science politique et la transition démocratique à l’Est »,Futur Antérieur, 1995, n° 1, en ligne : <http://multitudes.samizdat.net/La-science-politique-et-la.html>.
36 Kofi Annan (mars 2005) : « Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l’homme pour tous », (I. « Vivre à l’abri du besoin » ; II. « Vivre à l’abri de la peur » ; III. « Vivre dans la dignité », IV. « Renforcer l’ONU ») et les analyses critiques de Francine Mestrum, notamment son ouvrage Mondialisation et pauvreté. De l’utilité de la pauvreté dans le nouvel ordre international, Paris, L’Harmattan, 2002.
37 Voir la critique de Keith Krause, « Une approche critique de la sécurité humaine », dans Jean-François Rioux (dir.), La sécurité humaine : une nouvelle conception des relations interinternationales ?, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 73-98.
38 Sur la question des effets politiques de la mondialisation sut la fonction de juger, voir Julie Allard et Antoine Garapon, Les juges dans la mondialisation. La nouvelle révolution du droit, Paris, Editions du Seuil et la République des Idées, 2005, notamment p. 76 et suivantes.
39 William Bain, « In Pursuit of Paradise: Trusteeship and Contemporary International Society », Tidsskriftet Politik, n° 2, mai 2004.
40 Ralph Wilde et Barbara Delcourt, « Le retour des “protectorats”. L’irrésistible attrait de l’administration internationale de territoires étrangers », dans B.Delcourt, D. Duez et É. Remacle, 2004, p. 219-247.
41 William Bain, Between Anarchy and Society: Trusteeship and the Obligations of Power, Oxford, Oxford University Press, 2003.
42 Barbara Delcourt, « Le principe de souveraineté à l’épreuve des nouvelles formes d’administration internationale de territoires », Pyramides, n° 9, printemps 2005, p. 87-109.
43 Le Groupe de contact a été constitué en 1994 par l’Allemagne, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et la Russie afin de négocier entre ces grandes puissances le statut final de la Bosnie-Herzégovine et de l’imposer aux belligérants, ce qui fut fait lors des accords de Dayton l’année suivante.
44 David Chandler, « How “state-building” weakens States », Spiked essays, 24 october 2005, en ligne : <www.spiked-online.com/articles/oooooooCADDB.htm>.
45 Philip Cunliffe, « Ethical imperialism », Spiked essays, 24 october 2005; Natalie Bormann, « Normalizing Empire, Ignoring Imperialism », The University of Manchester/The Centre for International Politics Working Paper Sériés, n° 11, May 2005.
46 Mariano Aguirre, « Open Democracy », 15 juillet 2005, en ligne : <www.opendemocracy.net/xml/xhtml/articles/2679.html.>.
47 Voir « Renewing the Promise of Protection », Recommandations from the European Council on Refugees and Exiles to the Brussels European Council, 5 novembre 2004, on the Multi-Annual Programme Strengthening Freedom, Security and Justice in the European Union and recent proposals to establish camps in the Mediterranean region, p. 2 : « If Europe is serious about helping to improve refugee protection and respect for Human rights elsewhere in the world, it must embrace its own responsibilities to those who seek protection in Europe, and not attempt to shirk or shift them to poorer States. It must therefore improve access to the EU, national asylum procedures, reception conditions of asylum seekers and promote the integration of refugees and asylum seekers in European societies, in order to pave the way for a common procedure based on best practice. »
48 Ralph Wilde, « De Guantanamo à Abu Ghraib. L’applicabilité des droits de l’homme aux activités extra-territoriales des États », dans B. Delcourt, D. Duez et É. Remacle (dir.), 2004, p. 87-125.
49 Sami Makki, « Militarisation de l’humanitaire, privatisation du militaire »,Cahiers d’Études Stratégiques, n° 36-37, CIRPES, 2004.
50 Amy Bartholomew et Jennifer Breakspear, « Human Rights as Swords of Empire », Socialist Register, Londres, The Merlin Press, 2004.
51 Selon Amy Bartholomew et Jennifer Breakspear (2004), « This admittedly “impérial project” will require bringing actual stability to the “frontier zones” — and this must be donc, [Michael] Ignatieff insists, “without denying local peoples their rights to some degree of self-determination”. Thus, Ignatieff’s realist acknowledgement that “empire lite” is still empire (i.e., that “the real power in these [frontier] zones […] will remain in Washington” and will involve protecting vital national interests) is married to his insistence that achieving human rights rests on republican duty which itself requires the Empire as midwife: “The case for empire is that it has to become, in a place like Iraq, the last hope for democracy and stability alike” » (Ibid., p. 129).
52 e. a. N. Bormann, 2005.
53 Robert Cooper, « The New Liberal Imperialism », Observer Worldview, 7 avril 2002.